Bénéfique pour les uns, bien trop précoce pour les autres… A 2 ans, on est encore un bébé ! Alors, forcément, l’entrée à l’école – même si elle n’est que maternelle ! – n’est pas toujours vue d’un bon œil. Explications…
Deux ans : un âge stratégique
Même si la loi autorise la scolarisation précoce des enfants (une spécificité française depuis 1989), en pratique, les avis divergent. Du haut de ses deux ans, Pitchoun est en pleine phase d’acquisitions (langage, propreté, marche…). Pour franchir cette étape importante du développement, il a besoin d’un contact privilégié avec un adulte, une relation « duelle » qui va l’aider à trouver ses repères pour se construire.
Or, comme l’explique Béatrice Di Mascio, pédiatre, « l’école n’est pas suffisamment individuelle pour suivre les petits de deux ans comme ils devraient l’être. Ils ont un rythme
biologique différent de leurs aînés, même s’ils n’ont qu’un an d’écart ! La plupart des enfants de cet âge ont encore besoin de beaucoup de sommeil et de calme, pas toujours facile à trouver au
milieu de petits copains agités. Et puis, à l’école, les enfants doivent se plier à un certain nombre de règles qui peuvent être vécues comme de vraies contraintes : se lever tôt tous les matins,
faire ce qu’on leur demande, attendre qu’on s’occupe d’eux… »
Pour le Dr Di Mascio, « si le petit est scolarisé alors qu’il n’est pas prêt, il risque d’être perdu, de s’isoler ou même de régresser. Une des solutions serait de promouvoir des structures
d’accueil adaptées aux enfants de 2-3 ans, des structures intermédiaires entre la crèche et l’école maternelle… »
Les classes passerelles ont pour objectif de faciliter l’intégration du jeune enfant à l’école, en respectant son rythme et en l’aidant à se séparer progressivement de ses
parents. Comment ? En faisant le lien entre la crèche et la maternelle !
Lorsque les éducatrices de la crèche sentent que les petits sont prêts, elles les amènent quelques heures dans une classe passerelle pour rencontrer une maîtresse et des élèves de maternelle. Une
prise de contact tout en douceur pour initier Pitchoun à l’univers scolaire… qu’il pourra intégrer quand il sera prêt !
Actuellement, il n’existe que très peu de classes passerelles en France, un projet souvent encore « expérimental ». Pour plus d’informations, n’hésitez pas à vous renseigner auprès de votre
académie ou directement à l’école maternelle près de chez vous…
Il faut le reconnaître, devant le manque de structures d’accueil ou de gardes d’enfants, de plus en plus de parents sont tentés de mettre leur loupiot à l’école, ou du moins s’interrogent… Certains y voient un mode de garde idéal et peu coûteux. D’autres pensent que plus leur petit rentrera tôt à la maternelle, plus il aura de chances de « gagner » une année ou de faire partie des premiers de la classe ! Mais là aussi, attention, les avis sont partagés. Claire Brisset, la défenseure des enfants, constate dans son rapport annuel de 2004 que « le gain en terme de réussite scolaire est infime ». Un an plus tôt, elle préconisait même de « cesser de développer l’accueil des enfants âgés de deux à trois ans en maternelle dans les conditions actuelles. »
L'intégration des enfants étrangers
Voilà un point sur lequel tout le monde s'entend. Les enfants étrangers et issus de l'immigration, dont les parents ne parlent pas bien français, ont intérêt à fréquenter tôt l'école maternelle. Certains spécialistes y mettent, cependant, un bémol : à condition de bénéficier de bonnes conditions d'accueil et de souplesse dans le règlement de l'école (doudous, tétines, couches), dans l'esprit des classes passerelles.
Le développement du langage
Les spécialistes ne sont pas tous d'accord. Selon Alain Bentolila, professeur de linguistique en université : « L'acquisition du langage dépend de la médiation bienveillante et exigeante dont va bénéficier l'enfant. A cet âge, il a besoin d'un rapport quasi individuel avec l'adulte, ce que l'école ne propose pas » (Le Monde). Agnès Florin, professeur de psychologie et spécialiste de la scolarisation à 2 ans, souligne au contraire que « Toutes les études disponibles montrent un avantage de la scolarisation avant 3 ans, au moins dans le développement du langage » (Le Monde). Enfin, cette scolarisation peut avoir aussi un effet inverse si l'enfant ne parle pas où s'exprime dans un langage incompréhensible à son entrée à l'école, car à force de ne pas être compris, il peut être exclu et faire un blocage
Les apprentissages
Les enseignants de toute petite section de maternelle ont parfois le sentiment de passer plus de temps à gérer le quotidien qu'à enseigner. Avec plus de 20 enfants, entre les séances d'habillages, de déshabillages, les problèmes de pipi, de pleurs ou d'excitation dus à la fatigue, les doudous perdus? le temps consacré aux activités est d'autant plus réduit.Les études du ministère de l'Education nationale l'attestent : excepté pour les enfants étrangers et issus de l'immigration, l'avantage est assez faible du point de vue des acquisitions scolaires par rapport à un enfant scolarisé à 3 ans.
Le développement psychomoteur
Selon les pédiatres, si on laisse faire la nature, la maturation neurologique commandant les sphincters et permettant l'acquisition de la propreté est achevée à 3 ans, même si chez certains enfants, elle peut survenir plus tôt. Le problème est que pour pouvoir l'inscrire à la maternelle, on demande consciemment ou inconsciemment à l'enfant d'accélérer le processus de la propreté. D'emblée, on associe contrainte et scolarité.